Loyer : recours contre son bailleur

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Depuis le début du confinement, nous avons présenté les différents axes de négociation du loyer avec le bailleur : lui rappeler qu’il a un intérêt commun avec son locataire à trouver un accord gagnant-gagnant ; négocier une clause de retour à meilleure fortune ; mettre en avant les crédits d’impôt incitatifs, etc. Il arrive malgré tout qu’aucun accord ne soit possible. En ce cas, une procédure judiciaire sera généralement inévitable. C’est l’occasion d’explorer avec Me Baptiste Robelin, associé du cabinet NovLaw*, quelques stratégies judiciaires à mettre en œuvre en cas de contentieux locatif.

Demander la nullité du commandement de payer et des saisies conservatoires

En cas d’impayés locatifs, c’est généralement le bailleur qui prend l’initiative de saisir le juge pour demander la condamnation en paiement de son locataire. La procédure implique pour le bailleur de délivrer préalablement un commandement de payer, obligatoire avant de saisir le tribunal. Or il est généralement possible pour le locataire de devancer le bailleur, en saisissant le juge du fond de son côté, pour demander la nullité du commandement de payer. En contestant la régularité du commandement de payer devant le juge du fond, vous privez en principe votre bailleur de la possibilité d’initier une procédure de référé. Vous l’entraînez en quelque sorte dans une procédure longue, paralysant toutes les autres procédures. Or si un référé dure généralement quelques semaines, un procès au fond peut durer plusieurs mois, voire des années parfois. Cette technique vous permet donc de gagner du temps, ce qui vous mettra en position de force pour négocier un accord ultérieur avec votre bailleur.

Autre possibilité : si le bailleur initie des saisies attributives ou saisies conservatoires** sur le fondement du bail, vous pouvez saisir le juge de l’exécution pour contester la régularité de ces saisies. Il existe de nombreux motifs et vices de procédure : c’est également un gain de temps précieux, et un moyen de pression utile pour reprendre les négociations.

La défense au fond et la mauvaise foi du bailleur

Sur le fond, de nombreux arguments peuvent être invoqués pour contester le règlement du loyer pendant la période de la Covid : la force majeure, l’exception d’inexécution, le manquement à l’obligation de délivrance du bailleur, etc. Il faudra attendre de longues années pour connaître réellement la jurisprudence définitive sur ces sujets. Toutefois, nous connaissons déjà certaines tendances. En l’occurrence, les juges ont déjà condamné des bailleurs en rejetant leurs demandes en paiement des loyers, pour manquement à leur obligation d’exécuter le contrat de bail de bonne foi. Les juges retiennent généralement que les circonstances exceptionnelles de la Covid obligent les parties à tenter de trouver un accord pour adapter temporairement le contrat au contexte de crise. Or les bailleurs se montrant intransigeants, en refusant toute négociation, ont parfois pu être condamnés pour manquement à la bonne foi.

Demander au juge une médiation en cours de procédure

Devant le juge, qu’il s’agisse d’une procédure de référé ou procédure au fond, il est toujours possible pour les parties de demander l’ouverture d’une procédure de médiation, confidentielle, et sous la protection du tribunal. À Paris, les juges la proposent systématiquement. Or, notre expérience démontre l’efficacité de ces procédures : elles sont souvent l’occasion de retrouver le chemin du dialogue et de sortir de l’impasse entre bailleur et locataire.

Notes

*Cabinet d’avocat Novlaw, www.novlaw.fr

**Saisies que le bailleur peut faire sur les comptes du restaurateur sans attendre l’issue du procès, on les pratique par huissier.

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